Les moteurs des fusées


Le moteur Viking

Le moteur Viking a été conçu à partir d'un modèle de faisabilité de poussée de 400 kN. Cest à dire pour les peu habitués aux newton, une poussé de 40,8 Tonnes. Son développement effectif dans le cadre du programme Ariane, a commencé en 1973 et a permis la qualification, en 1979, des configurations Viking 5A et 4A destinées respectivement aux premier et deuxième étages du lanceur Ariane 1, avec des poussées de l'ordre de 760 kN. Par la suite des compléments de développement ont étés effectués:
- pour améliorer la stabilité de combustion,
- pour obtenir l'augmentation de poussée requise par les lanceurs Ariane 3 et 4 et passer aux versions 5B et 4B fontionnant à l'UH 25 au lieu de l'UDMH pure,
-pour démontrer l'aptitude du moteur du premier étage à supporter un temps de vol augmenté sur Ariane 4 (Viking 5C).
Au premier juin 1997, 853 moteurs Viking ont été produits. Réparties sur plus de 1 545 tirs, ils totalisent 143 652 secondes de fonctionnement cumulées dont 96 200 secondes en vol. Donc moins d'un tier du temps à faire des essais sur les bancs de tir. contrairement à Vulcain qui est dans la situation inverse. Pendant l'été 99 la SEP fêtait son 1000ième moteur Viking.
les moteurs Viking du premier étage, du deuxième étage et, le cas échéant, des propulseurs d'appoints des lanceurs Ariane 4 se composent d'un certain nombre d'élements qu'on peut voir sur le synoptique.

* D'une chambre de combustion ou foyer , dans laquelle les ergols, sont injectés sous une pression un peu supérieure à la pression qui y règne de 58,5 bar. Ces ergols sont bien sur un oxydant et un réducteur. L'oxydant est du peroxyde d'azote N2O4. Vous savez sans doute que l'azote est un produit dont les liaisons avec l'oxygène sont instable. L'oxygène libéré est alors tout seul est hyper réactif. Le réducteur était au début de la diméthyle hydrazine asymétrique. (CH3)2N-NH2. Le même raisonnement à propos de l'instabilité des liaisons avec l'azote permet de comprendre qu'il s'agit d'un réducteur extrêmement réactif.

Mais ce produit était trop instable, on a dut le remplacé par l'UH 25, c'est à dire un mélange de l'UDMH avec de l'hydrate d'hydrazine à 25%. Ces ergols sont finement pulvérisés dans la chambre de combustion pour réagir spontanément et donner des gaz à une température élevée voisinne de 3000°C. L'injecteur est en alliage léger et de type annulaire. Il comprend pour chacun des ergols 216 doublets de pulvérisation répartis sur 6 rangées.

*D'une tuyère de détente, dans laquelle les gaz acquièrent la vitesse d'éjection nécessaire à l'obtention de l'effet propulsif. C'est à dire que les atomes trés chauds, donc trés agités ce qui donne l'effet d'une pression, transforment cette énergie en un mouvement d'ensemble coordonné qui est de la quantitée de mouvement. Celà produit du même coup une détente et un refroidissement. C'est uniquement la forme de parabole de la tuyère qui provoque cet effet. Cette tuyère réalisée en alliage de cobalt comporte un col en SEPHEN. Ce matériau composite de résine phénolique et de fibre de silice est une réalisation de la SEP. L'ensemble du foyer et de la tuyère constitue l'éjecteur . Ses parois sont refroidies par un film d'UH25 alimenté par des canaux complémentaires situés en partie basse de l'injecteur.

*D'un système d'alimentation du foyer, dont la partie essentielle est une turbopompe monoarbre d'une puissance de 2500kW alimenté par un générateur de gaz.
Le générateur de gaz est une petite chambre à combustion séparée et fermée, qui combure un prélèvement des ergols destinés au foyer. C'est ce générateur de gaz qui produit toute l'énergie nécessaire au fonctionnement de la turbopompe. Comme les gaz qu'il produit sont trop chaud pour les fragiles ailettes de la turbopompe, on le refroidit avec un peu d'eau. La turbopompe tourne à 10 000 tr/mn ce qui n'est que deux fois la vitesse de rotation d'un honnête moteur à essence. Imaginez 50 fois la puissance du moteur de votre voiture dans un volume qui tiendrait sous le capot de votre voiture et vous comprendrez ce que celà a de merveilleux. Mais bonjour la consommation!
Cette turbopompe sert donc à aspirer les ergols de leurs réservoirs à peine pressurisés pour les monter en pression à plus de 60 bar. Ainsi ils peuvent gicler à l'intérieur des chambres de combustion la petite et la grande malgrés la pression qui y règne. Il y a donc trois pompes fixées sur l'arbre de la turbine qui fournit le mouvement. La pompe à UH25 qui est en rouge sur le dessin et aussi sur la photo au dessus. La pompe à N2O4 qui est en jaune sur le dessin et la photo . Et la petite pompe à eau qui est tout au bout de l'arbre.

*D'un régulateur principal destiné à asservir le niveau de poussée à une valeur de référence. Dans celui-ci une première boucle contrôle la température des gaz qui alimentent la turbine, en réglant l'équilibre des débits des trois fluides introduits dans le petit générateur de gaz. Une seconde boucle asservit la pression du foyer, donc la poussée, à une pression pilote, via la production de gaz, qui détermine la vitesse de la turbopompe et par suite le débit d'ergols entrant dans la chambre de combustion principale. On peut voir sur le synoptique toutes ces petites vannes commandées par un réservoir d'azote sous pression qui fournit la pression pilote.

*D'un régulateur d'équilibre qui contrôle la richesse, ou rapport de mélange, dans le moteur de façon à obtenir l'épuisement quasi simultané des deux ergols dans les réservoirs.

Le moteur HM7-B est un moteur cryogénique de 3ième étage. Il fut construit avant le moteur Vulcain et permis aux français d'expérimenter une technologie que les russes et les américains possédaient déjà. Il est toujours d'actualité et assure toujours la propulsion du troisième étage du lanceur Ariane 4. Fonctionnant pendant environ 800 secondes, c'est lui qui communique prés de la moitié de la vitesse de 10km/s nécessaire pour atteindre l'orbite de transfert géostationnaire. Il fut qualifié en 1979 pour le premier vol du lanceur Ariane 1. le HM7 a bénéficié depuis de plusieurs amélioratons qui ont permis d'augmenter la poussée, l'impulsion spécifique, la durée de fonctionnement et la fiabilité du moteur.
Au 1er juin 1999, 160 moteurs HM7 B ont été fabriqués et plus de mille tirs à feu cumulent prés de 235 000 secondes de fonctionnement.
Le carburant de ce moteur est de l'hydrogène liquide, le comburant est de l'oxygène liquide. La combustion de l'hydrogène est tout à fait spectaculaire, car la flamme est trés chaude, mais complètement transparente. C'est peut-être pour cette raison, que c'est le combusible qui communique la plus haute température aux gaz de combustion. Plus le lanceur a atteind une vitesse importante, plus il est utile que la vitesse d'éjection des gaz soit grande. Il est complètement indispensable d'avoir un moteur cryogénique pour le troisième étage d'une fusée, alors que le premier étage peut se permettre des technologies beaucoup moins pointues et des carburants comme le kérozène.

Forte de son expérience dans le moteur cryogénique HM7-B, la Sep a put se lancer dans le développement du moteur Vulcain.
Le moteur Vulcain est le moteur de deuxième étage du lanceur Ariane 5. Toutefois pour des raisons de sécurité, on l'allume au démarrage. Mais l'usage de l'hydrogène liquide ne se justifie qu'aprés que les boosters à poudre aient déjà donné à la fusée une certaine vitesse.
La poussée de 1140 kN, soit une centaine de tonnes est obtenue par un débit de 260 kg/s de gaz de combustions à la pression de 110 bar et à la température de 3500 °K dans la chambre de combustion. l'étude préliminaire a débuté en 1984. Le développement a commencé en 1988. La phase de mise au point c'est terminé en 1992, pendant laquelle 7 moteurs ont cumulé une expérience de 120 tirs et 18 000 s.Les années 93 et 94 correspondent à une phase de maturation. La phase de qualification commence en 1995. Lors de son premier vol ce moteur avait cumulé 87 000 s de fonctionnement en 280 essais. C'est un moteur extrêmement fiable pour emmener l'homme dans l'espace.

Voici un synoptique du moteur Vulcain. Le moteur est composé d'une turbopompe à oxygène et d'une turbopompe à hydrogène. Cette fois la turbopompe à oxygène est séparée de la turbopompe à hydrogène contrairement aux moteurs précédents.
Ces deux tubopompes sont alimentées par les gaz sous pression d'une chambre à gaz qui est une petite chambre à combustion indépendante de la chambre de combustion principale. L'oxygène liquide qui est situé dans un réservoir un tout petit peu préssurisé pour des raisons mécaniques atteint dans la turbopompe une pression qui lui permet d'être injecté dans la petite et la grande chambre de combustion par des injecteurs. L'hydrogène liquide est lui aussi situé dans un autre réservoir à peine pressurisé et il atteint grâce à sa turbopompe une pression lui permettant d'être injecté d'une part dans la petite chambre de combustion et d'autre part dans la grande. Mais avant de pénétrer dans les injecteurs de la grande chambre il traverse des canaux qui entourent la marmite en cuivre qui est la chambre de combustion et en refroidissant le cuivre, il le protège de la fusion.

En effet la chambre de combustion ressemble à une marmite en cuivre dont l'ouverture est vers le bas et pleine de trou dans le fond qui sont des injecteurs. Mais la température à l'intérieur de cette marmite est de 3200°C. Sans le refroidissement par l'hydrogène liquide, n'importe quel métal fondrait rapidement. Le cuivre est le métal d'un prix abordable qui transmet le mieux la chaleur grâce à la trés grande mobilité de ses électrons. L'ensemble doit également tenir à une pression de 80 atmosphères. Tout ce cuivre traversé par l'hydrogène liquide est donc contenu à l'intérieur d'une cloche en acier qui assure la résistance mécanique. La chambre de combustion se termine par un divergent qui permet aux gaz de se détendre progressivement jusqu'à la pression athmosphérique sans que leur capacité à créer une force propulsive soit perdue. En fait, les gaz convertissent trés rapidement leur pression excédentaire en énergie cinétique dirigée vers le bas et à un mètre en dessous du divergent la température est déjà tellement basse qu'il y a un triangle de vapeur d'eau condensée qui est visible. En effet ce qui est incroyable avec la combustion de l'hydrogène, c'est que la flamme soit complètement transparente dans les longueurs d'onde du visible. La flamme est tellement transparente qu'on voit le paysage au travers de la flamme. Et on voit un cône de vapeur d'eau à un endroit particulier de la flamme. Lorsque la fusée monte dans des couches de l'atmosphère où la pression est plus faible il faudrait pouvoir rallonger le divergent pour avoir d'avantage de poussée, mais ce n'est pas possible. Par contre pour les moteurs qui sont prévus pour s'allumer dans l'espace le divergent est beaucoup plus long. Ce divergent est lui même refroidit par des tubulures d'hydrogène liquide . Sur les côtés du divergent on voit deux gros tuyaux, c'est l'échappement des gaz de la chambre à gaz aprés qu'ils aient terminé leur travail dans les turbines.

Le prochain moteur de la SEP

Aujourd'hui un nouveau moteur est dans les cartons, il s'agit d'une version améliorée du HM7 qui aura la possibilité de s'allumer et de s'éteindre quatre fois pour mettre plusieurs satellites sur des orbites différentes. On peut aussi espérer qu'il serve un jour à se rallumer pour un alunissage en douceur.Il s'agit du moteur Vinci. Vinci car il fallait que le nom du moteur commence par un V et celà indique q'il est construit à Vernon. La difficulté technique a surmonter est la suivante. Si en fin de combustion, de la vapeur d'eau s'introduit dans la turbine, cela génèrera des cristaux de glace qui pourraient détruire les turbines au redémarrage. Pour éviter cette remontée de vapeur d'eau, il faut donc prévoir des vannes supplémentaires qui refermeront les canalisations. Pendant les essais au sol du moteur Vulcain, il est impressionnant de voir la durée de la mise en froid. Celle-ci est indispensable pour éviter toute présence de l'eau contenue dans l'air athmosphérique. Il faut alors plusieurs heures de mise en froid. Vers la fin de la mise en froid de l'hydrogène liquide coule du moteur pendant un temps trés long. On a pu constater pour les autres moteurs, que les gaz qui servent à faire tourner les turbines, ne servent pas à la propulsion directement. En terme savant on dit qu'on a un cycle à flux dérivé. En échange chaque partie du moteur est indépendante des autres parties et peut être testée séparément. Le moteur Vinci envisage lui, d'utiliser l'énergie liée à l'évaporation de l'hydrogène liquide pour faire tourner les turbines et cette même vapeur d'hydrogène servira aussi de combustible pour la propulsion. C'est trés ambitieux car toutes les parties du moteur sont alors imbriquées les unes dans les autres. Mais c'est normal pour un moteur de seconde génération. L'échange de chaleur est fait au niveau de la chambre de combustion et aussi dans la partie supérieure de la tuyère de détente. La tuyère est en deux parties une refroidie par l'hydrogène liquide et une en matériaux composites ce qui lui donne une très grande légèreté.
La hauteur de la tuyère est incroyable, puisque la hauteur totale du moteur est de 4m20. Le poids du moteur étant seulement de 555 kg.
Le mélange hydrogene oxygène est dans un rapport de 5.8, la poussée est de 180 kN. La pression dans la chambre de combustion est de 60 bar. L'impulsion spécifique est supérieure à 464 secondes. Ce programme a été lancé en 1998. En mai 1999 il a reçu l'approbation pour une phase développement plus poussée. La première revue de définition a eu lieu en Décembre 1999. Les premiers essais au sol sont prévus pour cette année 2002. On espère un vol de qualification en 2005.

Spécifications techniques

General
poussée dans le vide 180 kN
Impulsion spécifique dans le vide 464 secondes, c'est à dire le temps pendant lequel une particule fait son travail avant d'être perdue pur la fusée
Pression dans la chambre de combustion 60 bar
Diamètre en sortie de la tuyère 2.15 m
poids total 555 kg

Alimentation en d'ergols
taux de mélange 5.8 :1
l'oxygène c'est 16, l'hydrogène c'est 1, mais il en faut deux.Théoriquement le taux de mélange devrait être de 8:1, on constate qu'ils ont trouvé plus intéressant de surcharger en hydrogène.
flux d'oxygène liquide 33.7 kg/s flux d'hydrogène liquide 5.8 kg/s
Vitesse de la turbopompe à Oxygène 19 500 tours/mn
Vitesse de la turbopompe à Hydrogène 90 000 tours/mn
Puissance de la turbopompe à Oxygène 350 kW
Puissance de la turbopompe à Hydrogène 2400 kW

Le futur moteur de la SEP

La Snecma vient de passer un accord avec les russes pour être maitre d'oeuvre dans la réalisation d'un moteur Volga de 400 tonnes de poussée, et réutilisable 50 fois. Un véritable défi! On commence par remarquer qu'ils ont choisi le méthane et non plus l'hydrogène comme combustible. Ce choix ne peut qu'être raisonnable quand on pense aux difficultées qu'il y a à comprimer l'hydrogène liquide et aux puissances que celà représente. De plus la différence de température entre l'hydrogène liquide et l'oxygène liquide les avait obligés à séparer les turbopompes. Le méthane et l'oxygène étant des gaz beaucoup plus comparables, il sera peut-être possible de simplifier la machine avec un seul axe pour les deux pompes, comme sur le moteur Viking ?
mais 400 Tonnes, c'est dix fois le moteur viking et 4 fois le moteur Vulcain. Cet enjeu est nécessaire pour tenir tête à la concurrence américaine de Boing, avec son lanceur delta 4 et ses 300 tonnes de poussée. Ces travaux devraient aboutir sur un démonstrateur, attendu pour 2006-2008.

Vous pouvez allez chercher les dernières nouvelles.
Equinoxe

Retour au sommaire